Il a fini par m'appeler. Six mois de silence inquiétant. Il y avait bien ces SMS qui arrivaient de façon irrégulière. Tantôt abscons, tantôt ésotériques et toujours alarmants. Mal, le gars va mal. Depuis longtemps et la pente ne change pas de sens.
Je le savais au bord de la fenêtre avant l'été. J'ai fait ma part mais, à distance, ma part est fine. J'ai fait comme j'ai cru bon de faire, ni trop compatissant, ni trop rebooster. Je me dis que c'est déjà ça. Mais six mois au bord d'une fenêtre à se pencher puis se retenir, à faire le balancier sans se balancer et sans revenir, c'est dur et c'est long.
Il a fini par m'appeler. Depuis que les coups de fil sont gratuits, les bras de l'écoute embrassent plus tranquillement. Il m'a dit avoir des envies successives, de suicide, de meurtre et de fuite en avant. Pas peur de la mort, pas peur de la prison et pas peur de la misère. Juste peur de la vie.
Mon oreille gauche a senti l'heure passer mais n'en a rien dit. Ma voix est restée alerte, vive et gaie, faisant mine de n'être pas affectée par la détresse de l'ami. J'ai ramené au réel, au pratique, au quotidien comme pour remettre les pieds sur terre. C'est seulement plus tard, que les trapèzes se sont durcis, que le poids sur les épaules a fait courber le dos, que la bande sonore s'est déroulée vingt fois dans la mémoire.
J'ai promis de "faire un saut" dans l'année à venir (pour lui éviter le sien ai-je pensé sans le dire). J'ai promis.
Ses soixante berges ont osé me dire des choses sans retenue et sans pudeur. C'est puissant. C'est humain. Humain.
Il a fini par m'appeler. Mais pourquoi a-t-il cru bon de conclure par : "Voilà, s'il m'arrive quelque chose, tu auras le droit de réclamer une part de mes cendres ?"
J'en connais une qui est dans le même état...depuis un an! Et je ne sais plus que lui dire...
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