jeudi 19 août 2010

L'état second

Les événements s'étaient succédés, les uns après les autres, comme si les jours se croquaient comme un millefeuille, feuille à feuille. Lent chapelet de déboires poissards. Entrez, c'est ouvert, lui avait susurré l'état second. Il était entré, un peu curieux, un peu aux abois, se disant pourquoi pas. Il lui collait maintenant à la peau, l'état. Un goutte à goutte d'ondes négatives.
Benjamin s'évertuait à donner sens à l'expression sauver la face et sûrement que par moments, il y croyait lui-même. Ce n'est pas si mal, un monde inventé, en lieu et place de l'actuel, il se disait. Mais les piles comme vidées ne disaient pas ce qu'il sauvait au juste. Ni même s'il sauvait effectivement quelque chose.
Il était entré dans la transe, parce qu'elle suivait les événements précédents et précédait les suivants. L'état second lui filait le train et lui massait les tempes, il lui tenait les poignets et lui léchait les pores. Lui bouchait l'horizon, mais la responsabilité de l'état second ne sautait pas aux yeux. Pas plus que la culpabilité torve de Benjamin, qui semblait avoir été aspiré à défaut d'être inspiré. Ses bras ballaient, la démarche n'était point chaloupée. Rien n'indiquait qu'il fut conscient. Visiblement, quelque chose s'était effondré, et l'acharnement à rester debout était le maximum qu'il puisse faire ou entreprendre. A même se demander s'il n'y prenait pas goût par instants. Voire plaisir.
Les jours passaient et il disait oui. Les heures filaient et il disait ok. A part à lui, à tout le monde. Les jours meilleurs, se disait-il, finiraient bien par déboucher du tunnel, par surgir au débotté. Il s'efforçait donc de mener à bien chacun des engagements qu'il avait pris. Deux rendez-vous calés le même jour à la même heure en deux lieux différents  ne lui posaient pas plus de souci que ça. L'accumulation de galères diverses et variées non plus. Il honorait, quitte à jongler avec les horaires, quitte à donner du portable pour faire ubiquité, quitte à lâcher une liane pour en saisir une autre.
Benjamin voulait bien. Il pouvait peu. Il guettait la révolution. Mais laquelle ?

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