Louis-Paul et Claudio ont lu le même livre et ont décidé d'en parler sans s'en parler avant :
Louis-Paul : La marche est-elle vraiment le sujet de ce livre ? L’auteur utilise le verbe dans son titre et précise « Marcher, une philosophie ». C’est encore trop réducteur à mon goût! Je dirais que la marche en est le fil conducteur et tout le contraire d’une « méthode ». N’y cherchez pas de conseils ou des itinéraires, non, cherchez-vous plutôt.
Je me livre à ce petit exercice de parler d’un livre sans l’ouvrir, sans en mettre quelques « morceaux choisis » ni même une citation en exergue.
Mais je n’ai aucun mérite, c’est encore quelque chose que j’ai découvert à la lecture de ce (petit) traité qui m’a passionné de la première à la dernière ligne.
Comme si j’étais allé dans un amphithéâtre : Ecouter les meilleurs conférenciers me parler d’histoire, de géographie, de philosophie, d’art, de psychologie, de spiritualité, de poésie. Propos illustrés par de belles tranches de vie. (Nietzsche, Gandhi, Rimbaud, Kant, Thoreau…)
J’évoquerais donc ici plus mon ressenti que d’écrire une critique - fût-elle élogieuse - de ce livre. Que je résumerais par un bien être à sa lecture et la délicieuse sensation d’être de ceux qui l’ont lu. J’y ai aussi trouvé les mots - très précis- de ce que je ressens lorsque mes pas me mènent dans les rues de ma ville ou sur les chemins de Haute Provence.
Par ces temps de doute existentiel, beaucoup se demandent - souvent dans l’immobilisme - s’il est possible et comment, de donner un sens à sa vie. Au slogan « Habille-toi et sors », Frédéric Gros précise « et Marche » !
Agir dans ce qui nous est le plus naturel, laisser l’alchimie du corps et de l’esprit se réaliser pas à pas.
« Marcher, une philosophie », 300 mots ici pour 300 pages qui m’ont ravi.
Claudio : Dix ans après avoir lu "
Marcher, méditer" (M. Jourdan/J. Vigne) j'ai plongé avec délectation dans "
Marcher, une philosophie" (F. Gros). La filiation est évidente. La structure différente.
La marche comme prière qui unit l'intellect au corps. La marche comme rythme qui remet tout en place, corps et esprit. La marche comme chemin d'harmonie vers la nature.
On entend ici, marche solitaire qui permet une introspection bienveillante, une méditation éclairante.
Cet ouvrage a ceci de particulier qu'il consacre des chapitres à quelques poètes et penseurs, grands adeptes de la marche. De Nietsche à Gandhi, en passant par Rimbaud et Rousseau, l'auteur nous livre leurs escapades et la philosophie qui y est liée. On lit comme une suite de randonnées en charmante compagnie. Un concentré de richesse spirituelle qui vous transporte dans le sac de Rousseau, sur les pas de Nerval, vers des sommets de spiritualité active.
Difficile de choisir des extraits :
"Il n'y a qu'une performance qui compte, l'intensité du ciel, l'éclat des paysages.
Rechercher le vrai, c'est dépasser les apparences. C'est dénoncer les habitudes, les traditions, le quotidien, comme autant de conventions, d'hypocrisies, de mensonges.
L'utile c'est ce qui intensifie une puissance d'agir, augmente une production d'effets, accroît une compétence. L'inutile, le superflu, c'est tout ce qui demeure concédé à l'appréciation des autres et à sa propre vanité. Juste en-dessous de l'utile, il y a le nécessaire. Il est l'irremplaçable, l'incontournable, le non-substituable.
En marchant, on fait ses comptes avec soi-même : on se corrige, on s'interpelle, on s'évalue.
On se voit marcher bientôt, on se tient juste derrière soi, à quelques mètres, et on se suit"
J'ajoute que j'ai découvert Henry Thoreau et j'ai hâte d'approfondir sa connaissance et que l'idée m'apparait plus pressante d'aller refaire le chemin Nietsche, à quelques kilomètres de chez moi.